C’est le chat de la maison qui nous sorti de notre sommeil réparateur, Emmanuelle Trichet nous a préparé un petit déjeuner comme à la maison mais le temps passe vite, prendre une douche et filer sur Wasquehal, 15 km de rocade et les bouchons sont fréquents.
Les portables n’ont pas chargés dans la nuit, E.T me passe une batterie et nous file quelques boulons et écroux Anglais au cas ou.
On remercie E.T de son hospitalité, mais je regarde l’heure, on est dans les temps, mais sans plus, il faut partir.
Emmanuel TRICHET
Je mets mon équipement, Chet conduit le fourgon, Dr Kurtz suit avec sa moto.
Je rassemble les outils, les cartes, une tenue de pluie, le road book et surtout je recale dans ma tête les choses prioritaires :
- Refaire le plein d’huile en arrivant
- Controler la moto avant le départ
- Ma chaine primaire à un maillon défectueux, la réparation va t’elle tenir ?
- Ils annoncent de la pluie, quelle heure il est ? ?
Bordel ! on est pris dans un bouchon, je serais jamais à l’heure….
On arrête le fourgon sur la voie d’urgence, je vais prendre la moto à Kurtz pour filer à Wasquehal,équipé d’ un sac à dos pour mettre l’huile et les outils, Chet et Kurtz reprendront la moto sur le parc fermé et on se rejoint à Croix-en-Ternois, Kurtz est fatigué, je le sens fatigué.
Je prends sa Triumph légende et me voilà partis pour un contre la montre entre les files de voitures, la Légende freine moins bien que ma Norton, je fais gaffe, mais je tartine et enfin j’arrive à Wasquehal, la chose noir est seule dans le parc fermé, je me précipite pour faire une maintenance rapide pendant qu’un commissaire de course me dit que mon nom n’est pas dans la liste des départs, j’explique la situation, le mec me laisse partir, je suis à l’arrache.je rejoins mes collègues au stand de départ.
Je suis dernier avec Bébert qui roule en HONDA 125 S3, j’ai pas eu le temps d’installer le road book, je vais être obligé de speeder pour rejoindre les autres concurrents .
C’est parti, on sort de la ville sans trop de problème, le reste c’est du roulage sur des grands axes accompagné des Godier genoud et de quelques BMW, je me laisse aller, je suis dans un flottement, je me relâche, flasque sur ma moto et je fais confiance à mon sixième sens en gardant mes distances de sécurité.
Mon compteur indique 90 bornes et j’ai en vue le circuit de Croix en Ternois, il flotte à mort, je vois un hélico se poser, ça commence bien.
Je vais au CH : j’ai 15 minutes pour préparer la moto, l’assistance est pas là, de plus je constate que mon pneu arrière est maculé d’huile, j’en ai marre. J’ai le moral dans les pompes, je me sens faiblard et c’est pas le bruit des moteurs, le temps de merde, et les motos que je vois se crasher qui vont me foutre la pêche…
Chet, Kurtz, Hervé et Nanard (900 bol d’or) arrivent, ils me proposent à manger, ils vont s’occuper de mon pneu avec du papier absorbant.
HERVE ET NANARD
Il ya beaucoup d’attente, on est sous la flotte et on attend mon tour, je discute avec Gérard Rolland qui se plaint de ses pneus, parlons en des pneus.
Le rêglement m’a imposé de rouler en PIRELLI (voir l'article : "Du Pirelli, sinon rien !",), ils ont pu m’en fournir pour l’avant, mais la NORTON est en jante de 19, je suis donc un des seul à rouler en AVON, le problème pour avoir une gomme tendre, j’avais que des petites dimensions, donc je me retrouve avec un pneu arrière plus petit qu’a l’avant, hors de question de foutre de l’accélération dans les virages, c’est le gaufrage assuré, de plus j’ai très peu conduit la Norton sur mouillé, je connais pas ses réactions et je prend en considération qu’avec un pignon de 19 elle est "on/off", aucune souplesse.
Je mate la piste et je vois une Varadéro se foutre au tas devant moi, je demande à Chet de préparer la poignée de levier de frein, si je me gauffre, que l’on puisse réparer.
C’est l’attente, une longue attente et arrive notre tour .
Les deux 1000 VINCENT ont abandonné sur chute, je suis donc désormais le seul à représenter la moto anglaise sur cette épreuve.
On fait un tour de chauffe (en ce qui me concerne, ça tient lieu de reconnaissance), tout le monde est prudent. Vient le départ : je suis dernier en grille, au vert je mets gaz à fond avec succés, car au premier virage je me retrouve dans le peloton.
Je freine sur l’avant, le pneu tient, c’est la stratégie que je vais adopter, accélération sur les lignes droites et freinage de trappeur avec une grande prudence sur les virages.
Une kawa et une 750 SF me tournent autour, elles me passent dans les virages et je repasse sur la ligne droite et au freinage, je remonte sur une MARTIN, mais soudain je la vois décrocher en pleine ligne droite devant moi, je garde mon calme en effectuant un freinage progressif et garder une trajectoire afin d’éviter les pièces, la moto et surtout le pilote, dans une situation d’urgence je me prépare à coucher la moto, mais ça passe. Il a décroché tout d’un coup, bizarre…
Dans les accélérations, mon pneu arrière patine sur quelques mètres, je perds donc en vitesse, mais gagne en réchauffement de gomme, ce qui sur le mouillé est intérrèssant, je passe la ligne d’arrivée à la 9em place, ce qui me surprend, je m’en sors pas mal en fait.
Et c’est reparti, la course contre le temps, 15 minutes pour faire la maintenance, installer le road book, tension de chaîne, vérification et retour en parc fermé pour une demie heure.
L’occasion de parler avec Hervé et Nanard qui remontent sur PARIS, pour eux le DARK DOG c’est fini, j’ai au moins cette chance, je suis toujours en course.
Si ils avaient continué, on aurait fait bonne équipe ensemble, mais on remettra ça à plus tard, je le souhaite sincèrement.
Et le temps qui passe et il faut repartir sous la flotte pour 240 bornes de petites routes de merde, grasses, piègeuses, avec une signalisation quasi nulle.
Je suis accompagné d’un gars en BMW, on fait route ensemble, mais le problème c’est qu’on se trompe plusieurs fois, on en voit pas le bout, pourtant on tartine.
A un moment on décide de faire le plein d’essence dans une petite station garage dans un bled, le pompiste vient nous servir, un mec speed avec des grosses cicatrices sur la gueule et un putain d’accent du Nord.
« Le Monsieur il veut mettre de l’essence dans sa bécane le Monsieur ? »
« Ouais, le Monsieur il aimerait qu’on lui mette de l’essence »
Je mate le gars, j’essaye de cerner le personnage et là je vois quatre ados sortir en bleu de travail, blonds, mal coiffés, de l’huile de la tête aux pieds, une version des DALTONS, Démons de Jésus, échec scolaire, tous les mains dans les poches.
Ça ricane, ça s’fout des coups de lattes entre eux, des tapes sur la tête. Y’en a un qui me sort :
« Eh, Monsieur, elle est vieille ta moto !»
Je regarde le mome et lui lance
« Va falloir que tu grandisses un peu pour pouvoir rouler un jour sur une machine pareille, c’est une vraie moto ça. »
Les autres ricanent, contents que j’ai mouché leur pote, re-coups de lattes, coups de poings dans le ventre, ricanements.
Le pompiste qui doit être le maître d’apprentissage sort :
« MOI AUSSI JE POURRAIS SORTIR MA VIEILLE CHIOTTE ET FAIRE LA COURSE AVEC EUX »
Les momes s’époumonent et se tordent dans tous les sens en se filant des coups.
J’ai l’impression d’être dans un film, pas un documentaire, un film.
Donc j’impose ma présence, je paye le pompiste et dans un silence religieux ils attendent que je démarre la moto, je vois les quatre têtes en rotation un peu comme les chouettes , mais pas toutes dans le même sens,ce qui doit confirmer que leurs cerveaux n’est pas tous situés du même coté.
C’est la dernière vision que j’ai eu d’eux.
Je suis partis en trombe par pur amusement, je pense que ça à du leur plaire.
J’ai cogité ensuite sur la moto, les gosses que je viens de voir, ils ont bien des parents ? Pour ce déplacer leurs parents, ils ont bien une voiture ? Ben alors faitions gaffe….
Il faut rejoindre Orival, je ne connais pas le Nord, il y a des coins charmants, de plus, la pluie à cessé.
On arrive au départ de la spéciale, on est à la ramasse totale, on est arrivés à la bourre avec le collègue.
Au stand de départ , la route est mouillée et piégeuse, de plus la présence de mousse verte sur le bitume ne me dit rien de bon, je joue la prudence, j’estime que mon rôle est d’arrivé à Toulon et de ne pas prendre de risques inutiles, c’est ce que je fais et le résultat du chrono est catastrophique.
Je rejoins Val de Rueil.
Un mec qui s’arrête à ma hauteur, c’est MZRR, je l’ai pas reconnu sur le coup, on fini la liaison ensemble.
J’arrive sur les lieus du DARK DOG, je passe devant le car podium ou tout le monde est là à écouter le briefing, continuez sans moi, je ne fais que passer...
La nuit tombe, et c’est l’assistance pour deux heures de mécanique. La bas m’attend une surprise :
TERGAL, HUGO et deux de ses potes, j’avais complètement zappé ça.
Je suis content de les voir, de plus je remarque qu’ils sont hyper attentifs, tous ils ont envie de se rendre utile, ça fait du bien, on va pouvoir soufflé.
On est vraiment fatigués, je suis content de leur participation, MZRR tient la pile électrique (on est dans le noir) , Hugo monte sur la moto pour la tension de chaîne, ses deux potes mettent de l’huile, Chet répare la poignée d’accélérateur avec en guise d’éclairage, la lumière d’un portable, Tergal ouvre les bières... arf arf ! Kurtz monte le road book, moi je prépare les affaires pour le lendemain. C’est convivial, ça bosse, on déconne, mais on reste attentif, la moindre merde peut être fatale pour continuer la course, tout le monde le sait. De plus tout est organisé pour dormir et manger ce soir. Et c’est ce que l’on fait
Hugo nous offre le repas en guise de participation de sa grosse entreprise pharmaceutique, on baigne tous dans cette atmosphère de compétition, loin des articles fadasses vantants la moto sur du papier glacé, on est dans une autre dimension, la vraie dimension, l’essence même de notre passion... mais à quel prix ?
Physiquement HS, il va falloir continuer à se battre. J’aimerais rester avec mes potes, mais cette putain d’heure qui tourne et demain, lever de bonne heure, 800 km, une spéciale de nuit.
Peut être que cette aventure amène l’admiration, l’envie. mais moi je le vie comme une lutte, j’encaisse, j’essaille de caché ma fatigue.
Cette solidarité et l’aspect humain me renforce dans mes convictions, il faut faire finir cette moto coûte que coûte, je ferais abstraction de moi.
Toute les bonnes choses ont une fin, nous nous séparâmes donc.
Cette soirée m’a fait du bien, maintenant il faut dormir.
Merci pour cette soirée, merci…
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