LA BATAILLE D ANGLETERRE
 Le réveil sonne, courbaturé, ça sent le fauve, il faut dire que l’on est quatre dans la piaule dans le bloc jaune et rouge et de plus Kurtz dort la bouche ouverte ce qui a provoqué une certaine buée sur les vitres. Je me lève et je les bouscule, comme d’habituuuuuude...
Le hic, c’est qu’il y a plus d’eau chaude pour la douche, je suis colère. J’enfile ma seconde peau et direction le lac de Thonon pendant que je regarde sur le livret que Tatale a magnifiquement fait les instructions sur le parcours. Traversé des alpes, douze cols, 450 bornes. Au départ de l’épreuve, les techniciens démontent les lampions et les décors un peu comme une fin de bal de 14 juillet. Je me moule sur la moto qui maintenant à pris mes formes, un dernier salut à Bernard Bracam et direction la montagne sur la route glissante et le crachin pour arriver 40 bornes plus loin dans la spéciale (la même que j’ai fait hier soir, ou plutôt ce matin). Sur le plateau je vois une file de motos qui attendent le départ et notre Bébert en dernière position avec son 125 cg :
« Dit moi Bébert, tu vas quand même pas attendre et partir en dernier ? »
 Bébert, c’est le gars qui joue dans la cour de la modestie, il roule sa clop en te disant que « c’est comme ça » d’un air fataliste. Je décide d’intervenir auprès des commissaires de courses pour le faire partir devant tout le monde prétextant qu’il a un engin peu puissant. J’entraîne dans ma démarche Richard saint Vincente et un autre pilote (Tornado) pour obtenir l’accord de tous les pilotes, ce qui est fait. Et le petit 125 poumonesque se barre dans la spéciale, un petit coté Droopy.
Mon tour vient après une longue attente, l’occasion de voir cette spéciale de jour, bein on peut dire que c’est chaud, piègeux, ça passe, je ne prends aucun risque. Les yeux rivés sur le road book, je fais du pilotage pur, avec gestion du temps et des kilomètres, des directions, très mathématique. Maintenir le 60 km/h de moyenne n’est pas chose facile, le compteur se casse la gueule dans la moindre épingle, très peu de lignes droites, ça va pas être facile. Profiter de l’apesanteur des virages pour me mettre en lévitation, j’utilise très peu mes muscles, le minimum, mon cul est très rarement sur la selle, je ne force pas, surtout pas sur les poignées, je gère mon souffle, expiration sur le freinage, déhanchement, inspiration , récupération, je cherche l’harmonie parfaite .C’est répétitif, mais les gestes sont précis et commence à me venir des musiques dans la tête et me prend même a chantonner des conneries,ce qui confirme une certaine sérénité.
En ligne de mire d’autres concurrents que je double sans forcer, maintenir ma stratégie sans faire de provoc pour un combat éventuel, rouler à mon rythme. L’occasions de se retrouve dans divers peloton. Mon attitude change sans trop savoir pourquoi, mes instincts de gros con de male version guerre des boutons motorisé et là, me passe l’envie de m’amuser Etant très joueur, je choisi un concurrent pour une baston éventuelle, un peu comme un mec qui regarde une carte au resto pour savoir ce qu’il va bouffer et je chante toujours... au menu du jours je vois une DUCATI d’élevage MULTISTRADA , donc je vais goûter la Multistrada et tel un félin observant sa proie, je me place en observateur et analyse ma stratégie d’attaque, ça va être simple, je monte mes boisseaux de carbus à la verticale (GAZZZZZZZZZZZZZZZ en terme de motard d’élevage ascendant joe bar team), je double avant l’entré de l’épingle et je pique et r’ouvrant a donf et je rebalance dans la prochaine sur la gauche en déportant grave sur la droite pour bien aborder sur la corde : c’est fatal, la DUCAT lâche, donc, la DUCAT , c’est fait. Je recommence le truc plusieurs fois sur divers bécanes, surtout pour voir le comportement de la NORTON face à la concurrence et y’a aussi l’aspect ludique de ma par, c’est pour le fun, je prend mon pied, moi qui roule toujours tout seul, je serais con de pas en profiter.
 Photo Bruno Tomei
J’arrive au cul d’une HARLEY sports 1200 affûté, le mec dessus, c’est rock n roll attitude. Le combat va être beau et c’est pas le genre à lâcher le morceau, je l’ai repéré le gars et fouack, je passe devant. Il se colle à ma roue, il enmanche sévère, style dirt, je sais que ça pousse un Sportster, nos deux bécanes font un raffut du diable. J’ai cerné le pilote, faut pas le provoquer, c’est un warrior, je sais plus trop comment ça c’est fini, mais je me souviendre juste qu’on était à deux de front sur route étroite et qu’un gros bahut s ’pointait en face et même que je me demandais ce qu’il foutait là (un camion de carrière jaune moutarde).
J’ai un peu calmé le jeu pour cause de chaleur tropical sur le bloc propulseur du Commando (l’odeur de la fonte) et je descend peinard un col pour reposer Mademoiselle, pis là, qu’est ce que je vois, un scoeutaire baladin qui me fait moitié une queue de poisson, à MOI !
Réflexion ! Analyse ? Conclusion : PUTAIN MAIS IL ME CHERCHE LUI ! En plus un scoeutaire.
HOP ! Au boulot, je rattrape le bordel jaune et je lui fou une pression, je fais le mec teigneux, mais pas trop, car j’ai l’impression qu’il va s gameller, je repasse donc cette erreur de conception de la moto chère à l’organisation et là je vois une Varadéro qui se gauffre. Mon sens de l’humanité et de l’assistance m’oblige à interviendre (vous remarquerez le courage, porter assistance à une Varadero), je relève le mec, le gars en scoeutaire veut lui aussi interviendre sauf qu’il se pète la gueule en voulant s’arrêter, C’est dans un pouffement de rire intérieur bien dissimulé (on sait jamais, je pourrais me faire des ennemis) que je vois voler en l’air deux rétros et divers choses en matière plastique.
 Donc je me retrouve comme un con entre un scoeutaire et une Varadero et j’ai vraiment l’impression d’être a la cour des miracles, ils essaillent de réparer, mais ont pas trop d’outils, donc je me casse, le social, ça va hein !
Le hasard me met dans un groupe constitué de CBR et de GSXR (des vieilles), on se tape une descente de col mémorable, une bonne partie de moto, on bombarde à mort, mais c’est respectueux et chevaleresque, un super instant, les gars sont surpris par la NORTON (ils me l’ont dit après) Dans la vallée de la Maurienne, un vilain bruit a mis en alerte mon système auditif, je flippe, je sais pas trop ce qu’il c’est passé, de plus y’a gourage de route dans une ville, je prend du retard, il me reste deux cols a faire , le GALIBIER et L IZOARD, il me reste 30 minutes sur l’horaire de pointage, j’en vois pas le bout, je me farcis les deux cols comme une spéciale, avec en prime la crainte du manque d’oxygène (qui curieusement n’a pas perturbé le fonctionnement du moulin)
 ASSISTANCE A L'IZOARD
C’est donc rincé avec quelques minutes de retard, que je me retrouve au col de l’Izoard, Chet et Kurtz m’attendent, il fait froid, des mecs commencent à gueuler que les temps sont trop limites pour les liaisons, moi aussi je trouve ça chaud.
Une ½ de pause et c’est repartis, il reste pas mal de bornes, le col de vars, Barcelonnette, et le col de CAYOLLE (ou Couillote ce qui n’a rien d’érotique). l’enfer, le col de Cayolle je connaissais pas, mais tu en vois pas le bout, la route est défoncé étroite, l’enfer je vous dis, je me tape 20 bornes debout sur la moto, la moindre déformation me fout des coups de raquettes dans le dos, j’utilise donc la flexion de mes jambes pour amortir les chocs.
La nuit commence à tomber, je n’ai pas trop d’essence, je dois être juste pour aller à Valberg.
LE LAPIN EST AU MOTO TOUR CE QUE LE PETIT AFRICAIN EST AU DAKAR...
 Le lapin, le lapin, le lapin !
Dans la descente du col, une GODIER GENOU est devant la NORTON, ça roule bien, mais je vois un truc bougé au loin, je ralentis. Le mec devant moi n’a rien vu et soudain un lapin (un lièvre) déboule à toute vitesse devant la GODIER GENOU, le mec est surpris et manque de se gauffrer, il passe sur la pauvre bestiole, il a le flippe de sa vie, je le vois paniquer.
Le lapin est au milieu de la route il gueule comme j’ai jamais vu un lapin gueuler ouirk OUIRK OUIK OUIRK !
Arrivé à son niveau lui foutre un coup de pompe en pleine tronche pour abréger ses souffrances, j’aurais pu le faire... je l’ai pas fait, kruel = gros lâche !
Ça m’a fait chier, pauvre pinpin qui vivait dans sa montagne du sud, il vivait heureux avant qu’une grosse bande de gros cons viennent pour leurs loisirs foute le bordel avec leurs engins de l’ère moderne. Adieu pinpin
Le paysage est d’une beauté formidable malgré la séquence de cruauté dont j’ai été témoin.
La nuit tombe : VLAN !
Inquiet pour l’essence le gars, sachant que j’ai une réserve qui fait le volume d’un pot de yaourt.
Des policiers nous bloquent la route pour rejoindre VALBERG, un gars c’est crashé, et l’hélicoptère qui vient le chercher ne peut se poser que sur l’unique route qui mène à VALBERG.
L’ambiance est pesante, on cherche a savoir qui est le pilote, mais on a pas de détails, on attend ½ heures, je me couche par terre, j’ai le dos en vrac.
Le barrage est levé et on se tape encore cette route interminable dans la lueur faiblarde des phares, on passe devant un groupe de secouristes, des ambulances sont présentes et au loin dans le ciel, on voit les lumières clignotantes de l’hélico... GLUPS !
Contrôle de passage improvisé sur la route de montagne ou on pointe à l’aide d’une pile électrique et là, cerise sur le gâteau, on nous impose une spéciale de 5 bornes, ils voudraient que les mecs se foutent en l’air, ils s’y prendraient pas mieux, on est tous crevé, il est 21 heures, mais on y va quand même, ça gueule au niveau des pilotes. Le compte a rebours, le moteur qui monte dans les tours et tu fonces dans l’obscurité sans trop savoir ce qui t’attend, c’est dangereux, on est plus dans quelque chose de normal, nos pauvres motos classiques n’ont pas les possibilités d’éclairage des motos actuelles... bref !, c’est avec une grande satisfaction que j’arrive à Valberg, j’entend les pilotes gueuler dans tous les sens, la fatigue se fait sentir, je ne participe pas au débat, je gare la Norton et vais dans un bar boire une bière, j’en ai plein le cul, j’ai que deux heures de maintenance et l’assistance est pas là. Je suis donc dans le bar ou les locaux racontent l’animation du DARK DOG (cascade stunt et tout le bordel), je suis couvert d’huile et de poussière, 21h30, je vois KURTZ et CHET passer avec le camion.
photo Bruno Tomei
Hop, maintenance de la moto sur le bord d’un trottoir, on fini a 23 heures, il faut trouver un endroit pour manger et téléphoner au gîte ou l’on doit dormir.
TOUS LES CONCURRENTS EN CLASSIQUE, ONT VRAIMENT L IMPRESSION D'ETRE DELAISSES PAR L'ORGANISATION, c’est vraiment rageant le peu de considérations que l’on a, sachant que l’on doit faire les même moyenne que les machines modernes, on nous laisse seul, on se démerde, très peu de gens du DARK DOG sont là, on cherche le parc fermé, un endroit pour manger, la tension est palpable…..
Bouffe vite fait dans un snack à la con et direction le gîte en pleine montagne, charmant, putain la journée, quelle journée... .mais demain c’est TOULON, on approche, on va peut être réussir a faire descendre cette moto, mais quel boulot, quel boulot !
Kruel
|
|
